La Gazette des 9, le journal de Rosheim et du Piémont des Vosges

La Gazette des 9, le journal de Rosheim et du Piémont des Vosges

Les Plumes d'Alsace


Un jardin en bord de mer

Dans le jardin triangulaire situé à l’arrière de la maison, je me reposais enfin.
Ce grand jardin attendu, rêvé, fantasmé, était tel que je l’avais quitté un an plus tôt, comme si le temps s’était figé depuis mon dernier départ.
La bougainvillée retombait de tout son poids et ses fleurs mauves à la gueule grande ouverte déposaient de larges baisers sur l’herbe.
Seize heures sonnaient au clocher de la vieille église. Quelques mésanges bleues s’étaient réunies autour du bassin de pierres qui accueillait dans ses eaux aux reflets dorés des carpes koï qui se partageaient l’espace aquatique, maculé de nénuphars, avec des shubunkins aux corps multicolores.
Mon œil était attiré par les couleurs éclatantes des mésanges qui portaient fièrement leur calotte bleu cobalt rehaussant une élégante robe jaune et vert amande. Elles s’ébrouaient joyeusement dans l’eau et se délectaient de quelques insectes happés çà et là.

Une brise tiède s’était levée. Elle soulevait sur son passage les odeurs de la glycine du japon que ma mère avait plantée des années plus tôt près de l’abri de jardin.
Succédait à ce parfum celui de la lavande soigneusement plantée en bouquets devant la maison et l’odeur subtile des camélias.
Je me sentais lasse, si lasse et pourtant un souffle de vie émanait de ce jardin à l’allure tranquille.
Il ressemblait à l’image de mon père. Fort et protecteur. Doux et bienveillant.
Je m’y sentais en sécurité comme enveloppée dans un cocon.
Derrière le triangle de verdure s’étendait une ruelle étroite d’à peine un mètre de large qui descendait en pente douce vers la mer.

De part et d’autre du chemin du soleil levant, puisque tel était son nom, les jardins clôturés de murets de pierres se couvraient de clématites, de lierres abondants ou de bougainvillées généreuses.
Ce petit serpent de pavé aurait pu s’appeler le chemin du soleil couchant ou du soleil tout court, car il s’allongeait d’Est en Ouest et bénéficiait à chaque instant d’un soleil fidèle au Sud de la France. 
Il n’était pas rare de voir quelques chats endormis de tout leur long au milieu du chemin.
De gros chats si fainéants que musaraignes et lézards leur passaient sous la truffe sans même susciter chez eux le moindre battement de cil.
Lorsqu’on tendait l’oreille les jours de mistral, la mer se faisait entendre jusqu’en haut du chemin qui terminait sa course sur la place du grand chêne, où siégeait avec fierté l’église Saint-Michel.
Le soir, la ruelle s’animait de rires et d’anecdotes contées par les anciens du village qui se réunissaient à l’abri des regards des axes principaux jusque tard dans la nuit.

C’est ici, en conciliabule, que l’on tentait de prédire l’avenir d’une jeune parisienne fraîchement installée qui se faisait courtiser par le fils du cordonnier.
Dans le chemin du soleil levant, on décidait, on arrangeait, on condamnait, on célébrait. Il y avait toujours un destin qui se prenait dans les filets des commères nocturnes, mais le destin avait souvent prouvé qu’il pouvait contrarier les plans des diseuses de bonnes ou de mauvaises aventures.
Le mien avait été scellé en ces lieux il y a deux ans, lorsque l’employée de la pharmacie avait soupçonné qu’un mal me rongeait au vu de mes ordonnances.
Je me souviens de ses regards troublés et curieux en lisant les noms savants qui se succédaient sur le papier estampillé de l’hôpital du chef-lieu du canton.
Peu habituée sans doute à délivrer de tels traitements, j’ai deviné plus tard, en observant son comportement à mon égard, que la pharmacopole aux yeux jaunes et à la langue de vipère bien pendue avait déjà rendu, par audience publique, son verdict.
Mon cas avait été discuté en référé, sans audience, à l’arrière des maisons, sans mesure contradictoire et sans appel. Mon sort était tiré par les chiromanciennes villageoises, la peine de mort était prononcée.


La peine de mort. Ces mots me font frémir et m’interpellent lorsque j’y songe. Eprouve-t-on de la peine en mourant ou est-ce le sombre héritage que l’on lègue, contre son gré, aux personnes qui nous aiment ?
Audience, appel, protocole, ordonnance, la mort prend parfois des allures procédurières auxquelles je ne peux me résoudre.
Oui, je suis lasse aujourd’hui. Mais l’air et les odeurs du jardin ravivent mon âme.
Je refuse obstinément de mourir. 


Mon regard s’abandonne un instant sur le saule tortueux planté près du massif de roses.
Depuis sa naissance, il ne cesse d’étendre ses branches reptiliennes comme un serpent dont les écailles allongées et pointues se transforment en feuilles torsadées d’un vert brillant.
Je l’envisage comme un malade aujourd’hui, torturé et pourtant si vivant !
Le médecin me l’a pourtant affirmé : « trois à six mois, à moins d’un miracle ».
À l’image de ce jardin, je choisis le miracle.
Chaque hiver, bien qu’il ne soit pas trop rude dans mon « pays », comme le disent les anciens, il s’en va dormir, il se repose pour mieux renaître.
Chaque année, la nature reprend ses droits, la vie, la sève, le renouveau et la renaissance célèbrent le printemps.
Je traverse peut-être l’hiver de ma vie, mais je reviendrai au printemps prochain.
Il me reste tant de choses à raconter, tant de choses à vivre et tant de paysages à écrire, que trois à six mois n’y suffiraient pas.

Rose de Buci


28/03/2017
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Poupy et le mystère de Pâques. Fin de l'histoire.

Alerté par les cris de Poupy, Balthazar arriva au galop et avec ses deux pattes avant, défonça la porte de la remise pour la délivrer.
Giros, qui savait qu’il ne pouvait pas faire face aux attaques de coups de sabots de Balthazar, se sauva en courant aussi vite qu’il le put.
Léonard, qui observait la scène caché derrière la petite allée de cyprès, n’avait pas entendu l’albatros arriver derrière lui.
Il lui donna un énorme coup de bec dans le derrière. Le coup fut si fort que Léonard se mit à voler pour terminer sa chute dans la mare. Il tenta tant bien que mal de nager jusqu’à la rive.
Pendant ce temps, Poupy, verte de rage, avait saisi une fourche qui était posée sur le mur de la remise.
Elle se mit à la poursuite de Giros en criant :

- Giros, j’en ai pas fini avec toi ! Tu vas voir ce que tu vas prendre ! On verra si tu fais encore le malin quand tu auras goûté à mes coups de fourche ! Mémé m’a appris à me défendre contre les coqs comme toi ! Attends que je te tombe dessus et tu verras comme je sais me défendre !

Des aboiements de chien commençaient à se faire entendre aux abords du domaine. Sepp  arrivait, accompagné par Tyson, le gros dogue allemand du facteur.
Il ne leur fallut pas beaucoup de temps pour retrouver la trace de Poupy.

- Oh Sepp, tu es enfin arrivé ! Oh ! Et Tyson est avec toi ! Vous allez pouvoir m’aider, il faut absolument retrouver Léonard ! Il est près de la mare, attrapez-le ! De mon côté, je vais chercher l’endroit où il a caché les poules !

- Oui Poupy, on a fait aussi vite qu’on pouvait, je n’allais pas te laisser tomber après ce que tu as fait pour moi ! On va le trouver, tu peux nous faire confiance, répondit Sepp.

- Oui ! On va le retrouver et je vais lui aplatir son museau ! aboya Tyson.

Pendant que les deux chiens se dirigeaient vers la mare, toutes les hirondelles et les mésanges étaient venues rejoindre Poupy. Elles survolaient la propriété à la recherche d’indices.
Sepp et Tyson avaient réussi à s’emparer de Léonard. Tyson le regardait en montrant les crocs et en grognant aussi fort que le tonnerre, pendant que Sepp tournait autour de lui pour empêcher qu’il ne prenne la fuite. Léonard ne pouvait plus partir désormais.
L’albatros, quant à lui, avait repéré une plume au sol.
D’un battement d’aile il piqua du bec pour tenter de l’identifier. C’était bien celle d’une poule !
Il vola à toute vitesse dans la direction de Poupy pour la prévenir. Arrivée sur les lieux, elle saisit la petite plume brune et s’écria :

- Elles sont bien là, je suis sûre qu’elles ne sont pas loin, il faut absolument les délivrer !

Charles était enfin arrivé. Il stoppa net son tracteur à l’entrée du domaine et courut prévenir le Comte de ce qui ce produisait dans sa propriété. Les deux hommes allèrent rejoindre Poupy.

- Qu’est-ce-qui se passe ici jeune fille ? Charles vient de m’informer de cette histoire de poules et de renard ? demanda le Comte à Poupy.

- Bonjour monsieur le Comte, si vous avez deux minutes je vais vous raconter toute l’histoire, vous pourrez peut-être m’aider !

Poupy s’installa sur une pierre et expliqua à monsieur le Comte tout ce qui l’avait menée jusqu’au domaine.

- Je vais chercher mon fusil ! On pourrait en avoir besoin je crois bien.

Après de longues minutes de recherches, un caquètement sourd se fit entendre. Poupy, méfiante, demanda aux oiseaux de survoler le domaine une fois encore en ouvrant grand leurs oreilles. Elle commençait à fatiguer, la journée avait été rude.
Elle pensa : « Mais c’est pas vrai, qu’est-ce qui faut pas faire pour avoir du chocolat ! ».

- Poupy !!! Je crois qu’elles sont par là ! becqueta une cigogne en montrant du bout de son aile la petite fermette du jardinier de monsieur le Comte.

- Tu es sûre que ce n’est pas Giros qui me joue encore une fois un mauvais tour ?

- Je ne crois pas non ! Il semble qu’il y ait différents sons !

- Je vais voir dans ce cas ! Espérons que le poulet rôti soit loin sinon, à la marmite !

- Ne t’inquiète pas Poupy, nous allons toutes lui régler son compte.

Poupy poussa la porte de la ferme et pénétra dans une vieille grange. Le Comte et le vieux Charles arrivèrent juste derrière elle et il ne leur fallut que très peu de temps pour trouver les poules de Pâques.

- Elles sont là ! Comme je suis contente de vous retrouver ! s’écria Poupy.

- Oh Poupy ! Dieu merci tu es venue nous délivrer ! Sans toi je ne sais pas quel sort nous réservait ce renard. Nous avons vraiment eu très très peur.

- Moi je me demande comment j’aurais eu du chocolat à Pâques sans vous. Je suis heureuse que vous soyez saines et sauves. C’est le lapin qui va être content, et quand je vais raconter ça à Sam, il ne me croira pas ! C’est sûr !

Le Comte était dans tous ses états : « Mon Dieu, comment tout cela a-t-il pu se produire sous mes yeux sans que je ne m’aperçoive de rien, c’est terrible ».

- Peut-être que vos yeux sont trop fatigués et que vous êtes un peu sourd ? demanda Poupy.

Le Comte lui répondit par un sourire. Charles commençait à rassembler les poules pour les mettre en sécurité dans la remorque de son tracteur.
Il fallait encore trouver Giros et empêcher Léonard de nuire.

Tyson était un molosse à qui on ne la faisait pas. Léonard n’avait d’ailleurs tenté aucune échappée.
Les cigognes avaient eu une idée.
En passant par le jardin du Comte, elles avaient trouvé une grande nappe sur la table du déjeuner.
Après avoir prévenu Sepp de leur plan, Léonard fut repoussé vers la nappe qui se referma sur lui en un énorme sac.
Léonard était enfin prisonnier.
Tyson expliqua que son maître le facteur avait parlé d’un chargement qui partait par bateau le lendemain matin depuis le fleuve.

- Allez le jeter dedans. Là où il ira, il ne sera plus un danger pour personne, croyez-moi ! dit-il aux cigognes qui s’exécutèrent.

Le calme et le soulagement revenaient enfin au domaine. Il ne restait plus qu’à trouver Giros.
Avait-il fui ? Était-il là, près d’eux ? Personne ne savait où il se cachait.
Balthazar était retourné dans la prairie pour prévenir le lapin de Pâques de la bonne nouvelle.
Il était si heureux qu’il n’arrêtait plus de courir partout pour prévenir les autres avec une joie non dissimulée.

Poupy avait réuni tous les oiseaux pour les remercier de leur précieuse aide.

- Sans vous les poules ne seraient plus jamais rentrées chez elles et n’auraient plus jamais pondu d’œufs de Pâques, vous imaginez tous ces enfants privés de chocolat ? On a frôlé la catastrophe ! Merci pour votre aide les amis, j’espère qu’on se reverra très vite !

- Tu pourras toujours compter sur nous Poupy, répondit l’albatros, et tu sais que tu m’impressionnes ? Je trouve que tu es une petite fille très courageuse !

Tous les autres oiseaux acquiescèrent en battant des ailes. Monsieur le Comte promit à Poupy de faire tout ce qui était en son pouvoir pour retrouver Giros et  qu’il ne quitte plus jamais le sommet de la tourelle, quitte à le couler dans du plomb. Elle le remercia chaleureusement avant de sauter à bord du tracteur de Charles pour ramener les poules de Pâques chez elle.

Arrivées dans la prairie, les poules regagnèrent leur poulailler en promettant à Poupy de lui livrer les plus gros œufs en chocolat qu’elle ait vus.

- Alors ça ! J’ai hâte de voir ça ! Miam !! J’en ai le chocolat à la bouche !

Il était temps pour Poupy de dire au revoir à Balthazar.

- Tu es le plus beau petit cheval blanc que j’ai jamais rencontré Balthazar, et le plus courageux aussi. Je n’ai vraiment pas envie de te quitter mais je vais me faire disputer si je ne rentre pas à la maison. Tu ne m’oublieras pas, dis ?

- Poupy, comment veux-tu que j’oublie celle qui m’a donné un nom ? Et puis maintenant que tu sais écrire, tu n’auras plus qu’à écrire « Balthazar » sur le mur et nous nous retrouverons, sois rassurée. File avant de te faire disputer ! Je n’aime pas les adieux.

- J’y vais, dit-elle en lui caressant le flanc, je penserai à toi tous les jours mon Balthazar…

Poupy enjamba le mur en saluant les animaux de la prairie venus lui dire au-revoir et le mur se referma comme il s’était ouvert.

Léonard fut jeté dans un énorme container qui portait la mention « ALASKA » et quelques jours plus tard, un coq tout argenté avait pris place au sommet de la tourelle du domaine de Léonard.

Tout rentrait dans l’ordre et Pâques allait enfin arriver avec ses délicieuses surprises en chocolat pour les petits, et les plus grands…

©Laetitia Paz-Pelletier


31/03/2016
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Poupy et le mystère de Pâques. 4ème partie.

Première partie : http://www.la-gazette-des-9.com/poupy-et-le-mystere-de-paques-1ere-partie

Deuxième partie : http://www.la-gazette-des-9.com/poupy-et-le-mystere-de-paques-2-eme-partie

Troisième partie : http://www.la-gazette-des-9.com/poupy-et-le-mystere-de-paques-3-eme-partie

 

 

 

- Je suis désolé Poupy, tu ne t’es pas fait mal ? Tout va bien ? s’inquiéta Balthazar en la voyant.

-  Un petit peu si, mais ça va passer ! dit-elle avant de se précipiter au pied d’un arbre.

Balthazar se rapprocha d’elle pour empêcher les corbeaux de l’atteindre.
Il continuait à lever ses pattes avant pour effrayer les maudits volatiles.
Il réussit à empêcher les corbeaux de s’en prendre à elle, mais combien de temps allait-il pouvoir le faire ?
Soudain, on entendit un bruit sourd résonner dans la plaine.

Alerté par les hennissements de Balthazar, Charles, l’agriculteur, avait pris son fusil et tira une balle à blanc dans le ciel.
Il avait toujours son vieux fusil avec lui pour éloigner les oiseaux de ses champs en semis pour ne pas se faire picorer toutes ses graines.
Les corbeaux, qui s’étaient effrayés un instant, revinrent à l’attaque. Charles, qui avait couru en direction des cris de Balthazar et Poupy, tira deux nouveaux coups en l’air et cette fois, les corbeaux s’en allèrent définitivement. Le vieil homme connaissait Poupy depuis sa naissance. Il venait souvent rendre visite à mémé Lucie.

- Oufff s’exclama-t-il ! Que se passe-t-il ici ? Rien de cassé ?

- Non rien de cassé monsieur Charles, mais j’ai eu un peu peur. Les oiseaux nous ont attaqués !

- Sacré nom d’une pipe ! J’ai vu ça oui, satanés oiseaux de malheur ! Ils ne perdent rien pour attendre !

- Oui, heureusement que tu étais là Charles ! Merci beaucoup ! Sans toi on aurait perdu beaucoup de temps.

- Ah ? Et où cours-tu comme ça Poupy ?

- Ben…c’est que c’est compliqué Charles, j’ai pas trop le temps de te raconter l’histoire, on doit aller chez le Comte de Léonard.

- Le Comte de Léonard ? Il t’invite pour le goûter ?

- Non mais les poules de Pâques serviront de goûter au renard si je ne me dépêche pas ! Je file Charles ! Merci encore, mais je dois vraiment partir maintenant !


- Pas si vite ! Tu en as dit trop ou pas assez Poupy ! C’est quoi cette histoire de renard et de poules de Pâques ?
Poupy n’avait plus d’autre solution. Elle raconta rapidement l’histoire à monsieur Charles qui prit la ferme décision de les accompagner jusqu’au domaine.

- Toi Poupy, tu vas là-bas avec Balthazar. Moi je grimpe sur mon tracteur et je vous rejoins aussi vite que je peux !

- D’accord Charles, répondit Poupy en chevauchant Balthazar, on se rejoint au domaine !

Léonard avait été prévenu de l’arrivée de Poupy. Il avait déplacé les poules de Pâques de l’ancienne remise pour les mettre dans la propriété attenante au domaine.
Le jardinier du Comte résidait là, mais le rusé Léonard avait profité du voyage de ce dernier pour enfermer les poules dans sa cave.

Lorsque Balthazar et Poupy arrivèrent au domaine, l’albatros était déjà sur les lieux, accompagné de ses quatre cousines les cigognes. Ils s’étaient posés près du ruisseau et faisaient mine de n’être au courant de rien pour ne pas éveiller les soupçons.
Poupy demanda à Balthazar de s’arrêter et de la laisser descendre de son dos pour qu’elle puisse pénétrer à l’intérieur du domaine sans attirer l’attention de Léonard et de Giros.

Il lui fallait maintenant trouver l’endroit où le renard cachait les poules. Elle n’avait pas remarqué que Giros avait quitté le sommet de la tourelle pour se cacher dans l’ancienne remise.
Pour attirer son attention, il se mit à imiter le caquètement des poules.

- Ouf ! se dit Poupy, je crois que j’ai trouvé où sont retenues les poules !

Elle se dirigea à petits pas vers la remise dont la porte était entrouverte et se glissa doucement à l’intérieur.
Il faisait très noir et la pauvre petite n’avait pas remarqué que le rusé renard avait déjà reniflé sa présence.
Pensant avoir affaire aux poules, elle leur dit :

- Chuuut les amies, c’est moi Poupy, je suis venue vous délivrer. Ne faites pas de bruit, je vais vous faire sortir de là très vite !

Un long caquètement lui répondit d’une botte de foin. Rassurée, elle s’enfonça dans le noir de la remise sans savoir que Léonard refermait la porte derrière elle du bout de son museau. Avec sa patte, il fit coulisser le clapet extérieur et Poupy se retrouva prisonnière.
On entendit la voix du renard gronder :

- Vas-y Giros, c’est à toi de jouer !

Au même instant, le coq sortit de sa cachette et se jeta sur Poupy pour tenter de l’immobiliser.
Sans avoir eu le temps de pouvoir réagir, elle se retrouva au sol en quelques secondes.
Lorsqu’elle comprit ce qui venait de lui arriver, elle poussa de grands hurlements :

- Au secours ! Balthazar ! Je suis dans la remise, je suis prise au piège ! Viens me délivrer !
Et toi Giros viens ici ! Espèce de vieux coq ! Je vais te plumer et je te jure que tu ne feras plus jamais de mal à personne !

Alerté par les cris de Poupy, Balthazar arriva au galop et avec ses deux pattes avant, défonça la porte de la remise pour la délivrer.
Giros, qui savait qu’il ne pouvait pas faire face aux attaques de coups de sabots de Balthazar, se sauva en courant aussi vite qu’il le put.
Léonard, qui observait la scène caché derrière la petite allée de cyprès, n’avait pas entendu l’albatros arriver derrière lui.
Il lui donna un énorme coup de bec dans le derrière. Le coup fut si fort que Léonard se mit à voler pour terminer sa chute dans la mare. Il tenta tant bien que mal de nager jusqu’à la rive.
Pendant ce temps, Poupy, verte de rage, avait saisi une fourche qui était posée sur le mur de la remise.
Elle se mit à la poursuite de Giros en criant :

- Giros, j’en ai pas fini avec toi ! Tu vas voir ce que tu vas prendre ! On verra si tu fais encore le malin quand tu auras goûté à mes coups de fourche ! Mémé m’a appris à me défendre contre les coqs comme toi ! Attends que je te tombe dessus et tu verras comme je sais me défendre !

 

À suivre...

©Laetitia Paz-Pelletier.


26/03/2016
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Poupy et le mystère de Pâques. 3 ème partie.

Première partie :  http://www.la-gazette-des-9.com/poupy-et-le-mystere-de-paques-1ere-partie
D
euxième partie :  http://www.la-gazette-des-9.com/poupy-et-le-mystere-de-paques-2-eme-partie

Pendant ce temps-là, la grande prairie était en effervescence. Hirondelles et mésanges chantaient joyeusement l’arrivée du printemps et tous les petits animaux étaient affairés à accueillir la nouvelle saison avec entrain.
Les taupes creusaient de nouvelles galeries, les écureuils comptaient leur réserve de noisettes et de glands et les abeilles commençaient à sélectionner les premières fleurs à butiner. Seul le terrier du lapin de Pâques restait silencieux.
Il était tellement triste qu’il ne sortait même plus de chez lui pour chercher sa ration de laitue et de carottes quotidienne.

 

Il passait ses journées roulé en boule à se demander comment il pourrait se rendre utile et ce qu’il allait devenir maintenant qu’il n’y aurait plus de chocolats à livrer aux petits enfants.
Personne ne s’en était encore rendu compte dans la prairie, sauf un. C’était Glouton le mouton.
Le lapin de Pâques avait pour habitude de passer par son champ en revenant de la ferme.
Chaque jour, ils échangeaient quelques mots poliment et parlaient de la pluie et du beau temps.
Glouton était un vieux mouton qui n’avait guère de visite. Il s’ennuyait beaucoup et le lapin de Pâques était le seul à prendre un peu de temps pour lui parler.
Mais depuis quelques jours, pas de visite du lapin de Pâques.

Curieux et inquiet, il s’avança vers l’entrée du terrier et bêla aussi fort qu’il le put.

- Bêêêêêeeee ! Monsieur lapin ! Je suis inquiet ! Êtes-vous malade ?

- Fichez-moi la paix ! Je ne veux parler à personne ! Je ne suis pas d’humeur à faire la causette ! répondit une voix qui semblait venir du centre de la terre.

- Bêêêêêeee ! Allons, ne soyez pas borné ! Je peux peut-être vous aider ?

 


- À moins de savoir pondre, je ne vois pas comment...

- Pondre ? Un mouton ? Mais vous perdez la tête mon pauvre ami !

- Alors allez-vous-en ! Vous ne me serez d’aucune aide.

 

Glouton s’en alla comme il était venu, toujours aussi inquiet et toujours aussi curieux de savoir ce qui pouvait tracasser son ami.
En allant méditer au pied du cerisier, il vit au loin une silhouette s’approcher.
C’était Poupy et Balthazar.

- Bêêêêeeee ! C’est toi Poupy ! As-tu une minute à me consacrer ? J’ai vraiment besoin de ton aide, cria-t-il.

- Stop Balthazar ! Glouton m’appelle, je dois aller voir ce qu’il a.

Arrivée auprès de Glouton, elle l’interrogea :

- Bonjour Glouton, tu voulais me dire quelque-chose ? Je te préviens, je n’ai pas beaucoup de temps alors fais vite !

Glouton lui expliqua sa conversation avec le lapin de Pâques. Poupy demanda au mouton de l’emmener à l’entrée du terrier.

- Hohé ! Hohéééééé ! Y’a quelqu’un ? Lapin de Pâques, tu es là ?

- J’ai demandé qu’on me laisse tranquille ! Je ne veux parler à personne !

- Je m’excuse lapin de Pâques, mais j’ai pas beaucoup de temps alors sors ! Avec Balthazar, tu connais Balthazar non ? Ben avec Balthazar on va délivrer les poules !

Le lapin ouvrit les yeux et grimpa en haut de son terrier.

- Personne ne peut aller les délivrer, encore moins une petite fille comme toi. Arrête de dire des bêtises et rentre chez toi, tes parents doivent t’attendre.
Je vais faire une grève de la faim !

- Ah ? Une grève de la faim ? demanda Poupy, moi aussi j’en ai déjà fait une. Pendant deux heures…J’ai pas mangé les tartines de mémé parce que je voulais une glace et qu’elle voulait pas m’en donner.
Et puis je suis plus une petite fille ! Je te signale que maintenant je sais lire et écrire ! Même que j’ai fait apparaître Balthazar dans le mur ! Tu vois ? T’inquiète pas lapin de Pâques ! Je vais aller les délivrer les petites poules, et tu pourras livrer les œufs, fais-moi confiance.

- Si tu le dis, lui répondit le lapin d’un air sceptique.

Une petite mésange, qui avait entendu la conversation entre Poupy et le lapin prit timidement la parole :

- Hum hum, excusez-moi, mais je viens d’entendre votre conversation, peut-être que je pourrais me rendre utile ?

Poupy réfléchit un instant et lui répondit :

- Je crois que oui ! Tu connais Sepp le chien de monsieur Albert ? Va chez lui et dis-lui qu’il faut qu’il m’aide. Dis-lui de courir aussi vite qu’il le peut au domaine de Léonard. On va avoir besoin de lui si ce vilain renard fait des siennes. Fais aussi passer le message aux autres oiseaux et venez nous rejoindre là-bas !

- Tu peux compter sur moi Poupy, c’est comme si c’était fait ! s’exclama la mésange avant de prendre son envol.

- Allez Balthazar, en route ! On a encore du chemin à faire !

- À ton service Poupy, grimpe sur mon dos et accroche-toi bien à ma crinière, ça va secouer.

Balthazar galopait aussi vite que l’éclair. Il leur fallut moins d’un quart d’heure pour arriver près du domaine de Léonard.
Le ciel s’était assombri. On entendait le cri d’un corbeau fendre l’air.
Poupy leva les yeux et demanda à Balthazar de ralentir.

- J’aime pas trop ça Balthazar, j’aime pas trop ça du tout !

Au même instant, d’autres croassements se firent entendre. Les corbeaux envoyés par Giros venaient de retrouver Poupy et Balthazar. Ils se précipitèrent vers eux pour les effrayer et tenter de leur faire rebrousser chemin.
Ils se rassemblèrent en cercle et commencèrent à descendre pour stopper Balthazar dans sa course.
Leurs longs becs noirs frôlaient les deux  amis qui appelaient au secours.
Balthazar tenta de donner des coups de sabots aux corbeaux, mais ils étaient assez habiles pour les esquiver.
L’un d’eux arriva jusqu’à la croupe du cheval et lui donna un coup de griffes. Balthazar se mit à hennir tout en se cabrant et Poupy tomba au sol.



À suivre...

 

 

© Laetitia Paz-Pelletier.


25/03/2016
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Poupy et le mystère de Pâques. 2ème partie.

Pour retrouver la première partie de l'histoire, merci de cliquer sur le lien suivant :  http://www.la-gazette-des-9.com/poupy-et-le-mystere-de-paques-1ere-partie

 

En moins d’un instant, ils arrivèrent dans la basse-cour de mémé Lucie. Castafiore était perché sur une branche de poirier qui gisait au sol depuis l’automne dernier.
Le vieux coq n’avait plus trop la notion de l’heure qu’il était et chantait toute la journée.
Poupy lui expliqua la situation et lui demanda s’il connaissait un certain Giros.

- Curucuuuu ! Tu parles si je le connais ce trompettiste de basse-cour ! Nous avons grandi chez le même fermier.

Quand il fut temps pour lui de nous placer dans des fermes pour veiller que les poules fassent leur travail et soient plus disciplinées, môssieur Giros n’a jamais voulu que personne ne ramasse les œufs !
Il se postait en haut du poulailler, en tournant sur lui-même comme un fou, avant de se jeter sur le dos de ses propriétaires qu’il chassait à grands coups de bec dans le dos et de coups de pattes au visage !


Il a épuisé trois familles à faire son cirque, jusqu’au jour où il tomba sur le ferronnier du village.
Après avoir subi plusieurs de ses attaques, ce dernier le fit couler dans le métal avant de l’installer sur le toit d’un client.
C’était une commande spéciale du Comte de Léonard.
Il voulait un coq pour décorer le toit de son domaine. L’affaire fut signée entre les deux hommes et, depuis, Giros reste perché sur le sommet de la tourelle.
On raconte que la nuit, lorsque tout le monde dort, il descend du toit pour aller chasser avec le renard et obtenir sa vengeance.
Pour ce qui est des poules de Pâques, je ne pourrai pas t’en dire plus, mais va voir Jacasse, la commère du quartier d’à-côté, elle vit dans la ferme de monsieur Émile. Elle caquette à tout va, elle aura bien une information pour toi, Poupy !

- D’accord ! Merci beaucoup Castafiore !

Poupy grimpa sur le dos de Balthazar et il se mit au galop jusqu’à la ferme de monsieur Émile. Elle s’aventura discrètement jusqu’au fond de la cour et trouva Jacasse en plein discours !

- Cotcotcooot ! Vous savez les filles, j’en ai appris une bien bonne sur la petite poule rousse, vous savez Rosita, la fille de Granulette ! Figurez-vous qu’elle vient d’être adoptée par la famille d’Anglais qui vient de s’installer au village et qu’elle ferait déjà la cour à Montaigu le jeune coq. Il paraît même qu’elle l’appelle Milord pour lui donner de l’importance et avoir sa préférence Cotcotcoot ! Quel toupet !

Poupy se racla la gorge pour excuser sa présence dans le poulailler.

- Oh les filles, regardez, on dirait bien que c’est la petite Poupy ! La petite fille de Lucie, tu te souviens Charnelle ? Tu es née là-bas toi n’est-ce-pas ?

Charnelle, la poule blonde, acquiesça du regard et s’adressa à Poupy timidement :

- Poupy, sois la bienvenue, que nous vaut l’honneur de ta visite ?

Jacasse se mit à ricaner dans ses plumes d’un ton moqueur.

- Sans doute que la vieille Lucie n’a plus d’œufs et qu’elle vient nous en piquer !

- N’importe quoi ! Déjà mémé elle est pas vieille et pis j’te f’rai dire que toi aussi t’es vieille et que si t’ouvres encore ton clapet, un jour tu te feras couper la tête !

- Oh, regardez l’insolence de cette petite ! C’est une honte !

- Honte toi-même ! lui répondit Poupy énervée.
Je suis venue pour savoir si vous aviez des renseignements sur les disparitions des poules de Pâques ! Elles ont été enlevées par Giros et Léonard le renard.

- Et pourquoi on t’aiderait d’abord, espèce de petite insolente ?

- Parce que si tu m’aides pas, je dirais à Giros de venir avec Léonard pour te manger ! Et toc !

- Tu n’oserais pas faire ça, dis, Poupy ? lui répondit Jacasse avec une voix suppliante

- Je vais me gêner tiens !

- Bon d’accord, je vais te dire ce que je sais. Il paraît que la nuit dernière, on a vu le renard et Giros du côté du moulin avec deux grands sacs de graines. Il paraît que les graines contiennent de puissants somnifères qu’ils donnent aux poules pour les endormir et les traîner jusqu’à la cabane du domaine où ils les retiennent prisonnières.
Mais prends garde à toi, Giros a des espions partout, surveille bien les toits des maisons, il se pourrait bien qu’on informe Giros et Léonard de ton arrivée.

- Merci Jacasse, et merci pour tes conseils. Tu n’es pas si méchante que ça finalement.

- Oh Cotcotcot ! merci Poupy, répondit Jacasse en rougissant.

Poupy se mit à courir aussi vite qu’elle le pouvait et chevaucha Balthazar en lui disant de l’emmener en direction du moulin.
Elle lui raconta ce que Jacasse venait de lui dire.
Il fallait qu’ils s’assurent que ce ne soit pas une rumeur.
Ce que Poupy et Balthazar ignoraient, c’est que le coq qui siégeait au sommet de l’église avait tout entendu.

C’était un grand coq qui avait été mis en orbite sur le clocher pour espionner les autres volatiles. Ses oreilles et ses yeux étaient si puissants qu’on l’avait nommé Satellite.
Il s’empressa de donner le signal à Giros.
Il poussa un cri puissant, que seul Giros pouvait entendre, pour le prévenir que Poupy et Balthazar étaient sur ses traces.

 


Il quitta le clocher de l’église pour les suivre. Lorsque les deux amis arrivèrent au moulin, ils inspectèrent les lieux à la recherche des graines contenant les somnifères.
Dans la grange, il y avait un énorme sac de blé. À ses pieds, six colombes gisaient sur le sol sans bouger.
Poupy s’empressa d’aller voir s’il ne leur était pas arrivé malheur. L’une d’elles bougeait un peu. Poupy la questionna sur son état et la colombe bredouilla :

- Nous…nous avons picoré quelques graines de blé…et…nous…nous nous sommes endormies.

- J’en étais sûre ! Vous avez mangé les somnifères que Léonard le renard a mis dans les graines ! Pauvres petits colombes, je vais vous emmener dans la botte de paille pour vous mettre à l’abri le temps que vous repreniez vos esprits.
Vous serez en sécurité ici, dit-elle en déposant les colombes dans un grand nid de paille.

- Merci Poupy, tu es très gentille…Nous n’oublierons pas ce que tu…as fait.

- Je dois vous laisser, il y a urgence ! Balthazar et moi on doit trouver de l’aide.

La colombe lui confia que son cousin l’albatros était venu en vacances chez elle.
Elle dit à Poupy d’aller le voir de sa part, de lui expliquer la situation et lui certifia qu’il lui viendrait en aide.

- Tu le trouveras près de l’étang de pêche, près de la cabane…ajouta-t-elle avant de se rendormir.

Poupy prit un peu de paille pour recouvrir les colombes et s’en alla rejoindre Balthazar pour lui faire part des nouvelles informations qu’elle venait de recevoir.

- Il faut faire vite Balthazar, le temps presse ! Galope aussi vite que tu peux vers l’étang.

Balthazar s’exécuta. C’était un petit cheval, mais il était rapide comme le vent. Ils ignoraient que Satellite surveillait leurs faits et gestes.
Entre temps, Giros avait envoyé son armée de corbeaux, espérant ainsi dissuader Poupy et Balthazar de s’approcher du domaine de Léonard.

L’étang était calme. Seul l’albatros était sur les lieux, à la recherche de quelques truites pour son déjeuner. Il avait un peu le mal du pays et n’arrivait à se faire à l’idée de manger des graines et quelques morceaux de pain rassis glanés ici et là.
Il s’effraya en entendant le galop de Balthazar.

- Vous m’avez fait peur ! cria-t-il en direction de Poupy. Tout était tellement silencieux avant votre arrivée !

- Pardon monsieur Albatros, mais c’est ta cousine la colombe qui m’a dit que je tu serais là et que tu pourrais m’aider.

Elle lui fit part de tout ce qu’elle savait et de l’état de santé de sa cousine.

- Ah mais je vais lui rentrer dans les plumes à ce Giros, on ne touche pas à ma famille.
Je vais lui apprendre à voler droit à cet énergumène, parole d’Albatros !
Dis-moi où est situé le domaine de Léonard et je vole donner une bonne leçon à ce grainetier !
Au passage, je demanderai à mes cousines les cigognes de venir nous aider. Elles sont de retour de leur voyage au Maroc et elles ne refuseront pas, parole d’Albatros !


Il abandonna sa partie de pêche et partit en direction du domaine.

léonard.jpg
Le domaine de Léonard le Renard...

 

À suivre...

 

© Laetitia Paz-Pelletier.


24/03/2016
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